Les Kabyles peuvent-ils être considérés comme des Arabes ?
Ou bien ont-ils été colonisés par ces derniers ?
Ce débat houleux soulève bien des passions sur les forums, ainsi que sur les différents réseaux sociaux (et associaux).
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Certains prônent la distinction nette entre un berbère et un arabe.
Quand d'autres nient totalement cette différence.
En tout cas, chaque mois, ce sont des centaines d'internautes "berbèrophiles" qui se posent la question sur Twitter.
Conversation avec une fille (dz) de mon atelier ce matin:
— Neness👩🏻🎨🌷 (@_neness_dbc) November 8, 2021
- « une vraie arabe toi »
Moi : « haha Jsuis pas arabe personnellement »
- « Tes quoi alors ? T’es algérienne pourtant »
Moi : « Jsuis kabyle mdrrr »
- « C’est pareil t’es une arabe »
Moi: 😐😐😐
Tentons donc de trancher le nœud gordien pour de bon.
Histoire de rétablir certaines vérités à ce sujet.
Quand les Arabes sont venus envahir le Maghreb
(© geralt via Pixabay)
De la bataille de Sufétula en 647 à la prise des dernières forteresses byzantines par le califat omeyyade, en 709, la conquête musulmane du Maghreb a été un tournant civilisationnel dans la région.
La mort du prophète Mahomet, en 632, a marqué le début de l'expansion de l'Islam en Afrique du Nord ainsi que dans une partie de la péninsule ibérique.
Sous l'impulsion d'Abdallah ibn Saad, des raids sont menés vers l'Exarchat de Carthage, avec l'aide de troupes envoyées depuis Médine, dans la péninsule arabique.
Mais au fil des décennies, après trois vagues successives de conquêtes, les musulmans parviennent à "grignoter" le nord de l'Afrique jusqu’à atteindre les côtes de l'Atlantique.
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Même si cette arabisaton à marche forcée ne s'est pas faite sans résistance de la part des autochtones.
En effet, les Omeyyades qui contrôlent les plaines de la Kabylie, ne parviennent pas toujours à imposer leur autorité dans les campagnes.
Les montagnes aux alentours de Béjaïa ont été des points de résistance redoutables pour les conquérants.
Malgré tout, la faiblesse des Byzantins, avec un Etat en déliquescence, a permis aux Arabes, bien que peu nombreux, de vaincre le patrice, avant de mater les différentes rebellions des chefs berbères.
De même, l'impôt foncier sur la terre (« kharaj » en arabe) exigé par les Arabes n'est guère plus élevé que celui qui était jadis exercé par le fisc byzantin.
En 709, tout le Maghreb finit sous le contrôle du califat omeyyade, ce qui marque donc la fin des conquêtes.
Et deux années plus tard, en 711, commencent les premiers raids musulmans à Gibraltar, en Andalousie.
L'islamisation des Imazighen
(© 2743063 via Pixabay)
L'invasion de l'Afrique du nord par les Arabes a définitivement mis fin au christianisme dans la région.
Et ce, pour plusieurs siècles.
Faute d'une tradition monastique ferme et de l’émergence d’hérésies, comme le donatisme, l’Église a fini par perdre son influence dans cette région.
Pire encore, lorsque des régimes fondamentalistes berbères musulmans Almohades et Almoravides arrivent au pouvoir, les Chrétiens berbères finissent par faire l'objet de persécutions sanglantes.
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Certains, sous la menace, doivent se convertir de force à l'Islam.
Mais progressivement, et sous l'impulsion notamment de marabouts, l'Islam finit par gagner le cœur et l'esprit des autochtones berbères qui finissent par s'approprier cette religion.
Ce qui n'empêche pas les autorités arabes de les traiter comme des citoyens de seconde zone.
Les gouverneurs arabes continuent en effet de percevoir l’impôt dhimmi afin de maintenir ces populations dans un état de servitude permanent.
(© Pengland via Pixabay)
Ce qui a conduit, sous l'influence des des Kharijites, à la la Grande révolte berbère de 739/740, qui dura jusqu'en 743, avec l'effondrement du califat Omeyyade.
Les Imazighen, en retrouvant leur indépendance, instaurent par la suite la dynastie des Aghlabides, qui régna jusqu'en 909.
Les Kabyles gardent ainsi une certaine autonomie politique à l'égard du pouvoir central.
Ils adoptent l'Islam, tout en conservant leur langue et leurs coutumes.
C'est la quintessence même de leur identité.
L'émergence d'un identitarisme kabyle 
(© 6335159 via Pixabay)
Au fil des siècles, et malgré les dominations impériales successives, cet esprit de liberté n'a jamais quitté la Kabylie.
À l'instar des Catalans depuis des décennies, c'est un peuple qui de plus en plus lutte pour son indépendance.
En juin 2001, est né le Mouvement pour l'Autonomie de la Kabylie (MAK), sous l'impulsion de Ferhat Mehenni, en plein milieu du Printemps noir.
Ce mouvement kabyle est une réponse à la crise que traverse la région, qui milite activement pour une autonomie plus forte.
Depuis sa création, le gouvernement algérien tente par tous les moyens d'étouffer l'émergence de cette force politique.
En juin 2004, le fils aîné de Mehenni est assassiné à Paris, sans que les auteurs de ce crime soient retrouvés.
Certains estiment que ce meurtre est la conséquence de son engagement militantiste.
Régulièrement, les membres du parti font l'objet d'intimidations.
En juin 2010, à Paris, le gouvernement provisoire kabyle est autoproclamé.
Quatre ans plus tard, en décembre 2014, un drapeau est "élu" démocratiquement par tous les Kabyles du monde entier.
Cet étendard souverainiste fait l'objet, depuis sa création, de nombreuses interdictions sur le territoire algérien.
Sa distribution, depuis les aéroports, est un délit majeur.
Lors du Hirak, le général Ahmed Gaïd Salah a fait savoir que le drapeau Amazigh ne sera plus toléré dans aucun défilé.
C'est dans ce contexte, d'extrême hostilité, que ce mouvement tente de s'imposer.
Va t-il y avoir sécession territoriale avec le reste de l'Algérie ?
À l'instar du Kosovo en 2008, la République de Kabylie pourrait éventuellement voir le jour dans les années à venir, avec Tizi Ouzou comme capitale.
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